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Entretien avec le ministre de l’Intérieur portant sur la réforme de la police nationale

Chers collègues,

Jeudi soir, une délégation du SICP, composée de son président, Olivier Boisteaux et de ses deux secrétaires nationaux, Jean-Paul Megret et Tristan Coudert, a été reçue en entretien bilatéral par le ministre de l'Intérieur, accompagné de son directeur de cabinet et du DGPN.

L'ordre du jour comportait un point unique : le projet de réforme de la police nationale, pour lequel le ministre a recueilli successivement les avis de toutes les organisations syndicales représentatives de notre institution.

Une nouvelle fois, le SICP a pu faire entendre sa voix singulière, dans un paysage syndical qui a montré jusqu'à assez récemment un empressement très mesuré à s'intéresser au sujet dans ses détails et sa plus fine déclinaison.

Nous avons développé auprès de nos autorités notre position constante sur ce thème, que vous connaissez déjà précisément (si ce n'est pas le cas, vous pouvez retrouver notre dernier écrit en cliquant sur ce lien).

Pour mémoire et à très gros traits, nous estimons que la réflexion de fond a été bâclée et la concertation réelle quasi inexistante (toute proposition d'amendement étant systématiquement rejetée). Nous pensons qu'il sera impossible de mettre cette réforme en œuvre convenablement dans le temps imparti, qui est bien trop court, ce qui engendrera de graves difficultés de fonctionnement notamment sur le plan RH. Le calendrier est d'autant plus mal choisi que ces difficultés interviendront pendant de grands événements majeurs dont les Jeux Olympiques, et ce sans que l'activité quotidienne ne cesse. Nous estimons que les préalables techniques à la réforme ne sont pas réunis (conséquences RH anticipées, réflexions immobilières, outils numériques adaptés aux futures entités pour assurer la continuité du service etc.).
Enfin, sur le fond, cette réforme nous pose des questions quant à sa pertinence, notamment sur les points suivants : complexification à outrance du système hiérarchique avec création d'un mille-feuille administratif mêlant de multiples autorités hiérarchiques et fonctionnelles ; entité départementale inadaptée à une partie des missions ; volonté d'aller vers la tout polyvalence, alors que nos métiers se sont complexifiés et que nous avons passé des années à spécialiser et former des professionnels compétents sur leur matière.

Ce sont ces arguments que nous avons développés auprès du ministre, en insistant particulièrement sur la question de l'agenda. Nous lui avons redit qu'il était matériellement impossible de mettre en œuvre cette réforme dans les délais prescrits, ce qui aboutira a de très nombreuses situations individuelles dégradées (concessions de logement, postes D et TD, nomenclature, mobilité, NBI nécessitent par exemple une refonte complète des textes et donc un temps long) et à un risque pour la qualité du service public au quotidien.
Le ministre a admis qu'il s'agissait d'une réforme de grande ampleur qui mettrait plusieurs années à être stabilisée. Il y voit une raison de plus pour démarrer le plus vite possible. Nous ne partageons pas son point de vue et avons argumenté sur ce point : le chaos administratif dans lequel nous risquons de nous trouver dans quelques mois sera de l'entière responsabilité de nos autorités, car une autre conduite de réforme est possible. Nous pouvons préparer les organigrammes, les textes, les nomenclatures et l'ensemble des points à aménager, et ne lancer le tout qu'une fois le projet finalisé, au lieu de le conduire au fil de l'eau, sans visibilité, ce qui va nous amener comme toujours à des aberrations, comme nommer des collègues qui vont déménager leur cellule familiale pour occuper des postes qui disparaitront dans quelques mois, faute d'une nomenclature achevée.

Le ministre a pris acte de nos inquiétudes et désaccords, expliquant respecter notre point de vue.

A la demande de plusieurs organisations syndicales, il envisage la mise en place d'une interdépartementalité de certains services de police judiciaire, selon des modalités qui pour l'instant sont en réflexion. La grande couronne pourrait être concernée, ce qui constituerait un début de solution pour la PJ de Versailles. Tout en reconnaissant que chaque amendement qui desserre un peu le carcan départemental est bon à prendre, nous nous interrogeons sur cet ajout d'une nouvelle strate au mille-feuille déjà prévu, et affirmons que ce léger aménagement ne répond pas aux problématiques nombreuses créées par ce projet.

Nous maintenons que désormais, il n'existe qu'une unique sortie de crise : reporter largement la date de mise en œuvre de la réforme et se mettre au travail, dans la concertation, pour la préparer sérieusement afin d'éviter qu'une mise en place bâclée ne génère trop de stress et d'anxiété chez nos collègues qui ont plus que jamais besoin de sérénité pour préparer les prochaines grandes échéances qui nous attendent.

Le ministre nous a indiqué attendre la remise du rapport sénatorial, en milieu de semaine prochaine, pour faire des annonces officielles en la matière.

Nous restons à votre entière disposition pour répondre à vos questionnements sur cette thématique extrêmement impactante pour notre institution.

Olivier BOISTEAUX      Tristan COUDERT        Jean-Paul MEGRET
Président du SICP                    Secrétaires Nationaux